C’était un 1e février 2017, lorsque le Congo tout entier s’arrêtait, la triste nouvelle venait de tomber, le « Sphinx de Limete » rendait l’âme à Bruxelles de suite d’une maladie, à l’âge de 85 ans. Onde de choc, consternation, le pays entamait un deuil auquel il ne s’attendait pas, dans une période où sa présence à la table des discussions entre l’opposition et la majorité était plus que souhaitée.
En effet en cette année, sous l’égide de l’église catholique, le pouvoir de Joseph Kabila et l’opposition discutaient sur une transition, après l’échec de l’organisation des élections générales en 2016, comme prévu par la constitution. Tête de file du rassemblement de l’opposition, Etienne Tshisekedi wa Mulumba laissait ainsi les siens, créant un vide que personne n’avait ni l’étoffe ni la carrure pour le combler.
Du pouvoir à l’opposition
Premier étudiant à décrocher un doctorat en droit à l’Université Lovanium (actuelle université de Kinshasa), Etienne Tshisekedi wa Mulumba a commencé sa carrière politique dans les années 60. Il a plusieurs occupé les fonctions de ministre pendant le règne du dictateur Mobutu, avec qui il prend ses distances au début des années 80. En 1982, il crée son propre parti politique, l’Union pour la démocratie et le progrès social, UDPS.
S’ouvre alors une lutte acharnée et non violente pour l’instauration de la démocratie et l’état de droit. Lutte qui va le conduire à plusieurs reprises en prison, relégué dans son village natal et traqué par les services de sécurité.
Après le départ de Mobutu et l’avènement de Mzee Laurent Désiré Kabila, Tshisekedi reste égal à lui-même, intransigeant sur les questions de démocratie et droits de l’homme. Il appelle au rejet du gouvernement de Kabila et est relégué à nouveau dans son village natal. Joseph Kabila arrive et rencontre la même résistance, celle d’un homme dont l’intérêt général était l’unique objectif du combat.
Convaincu de la machine de fraude mise en place par le jeune président de la République, Etienne Tshisekedi appelle au boycott des élections de 2006. En 2011, il prête serment en sa résidence comme président « élu », alors que la commission électorale a proclamé Joseph Kabila comme vainqueur. Il revendique depuis lors la légitimité et dénonce un braquage électoral.
Un lourd héritage et « beaucoup » d’héritiers
6 ans après sa disparition, Étienne Tshisekedi wa Mulumba demeure une figure emblématique de la lutte pour l’instauration de la démocratie et de l’État de droit. En RDC, plusieurs considèrent son fils, l’actuel chef de l’État Félix Tshisekedi Tshilombo comme digne héritier de son combat, lui qui l’avait succédé à la tête du parti, UDPS.
Mais dans l’opposition, plusieurs sont ceux qui se considèrent comme successeurs du combat du « Sphinx ». C’est bien le cas de Martin Fayulu qui se revendique héritier du Tshisekedisme, adoptant parfois les attitudes et les positions tranchées de celui qu’il considère comme modèle politique.
|Par Arsène MPUNGA