Élu en juin 2021 dans les entrefaites de la déchéance de l’ancien gouverneur Jean Maweja Muteba, le Président de l’Assemblée provinciale du Kasaï-Oriental avait réussi jusqu’ici à assurer la stabilité au sein de cet organe délibérant, et avec d’autres institutions comme le gouvernement provincial. Mais il y’a 3 jours, un groupe de 13 députés provinciaux veulent son départ, à 5 mois de la fin de la législature.
Dans une déclaration de retrait de confiance rendue publique le lundi 10 juillet, ces députés reprochent à Athanase Kabongo Malebongo plusieurs griefs dont l’incompétence, la mauvaise gestion du budget de l’assemblée, mauvais fonctionnement de l’administration, et le non respect des droits des députés. Ils ont écrit au vice-président pour solliciter la convocation d’une session extraordinaire en vue d’examiner cette question.
Cependant, plusieurs observateurs s’interrogent sur le réel mobile de cette entreprise parlementaire, alors que l’assemblée provinciale est en vacances et doit tenir sa dernière session de cette législature en septembre prochain. S’agit-il d’un règlement des comptes ? Les députés pétitionnaires ont-ils d’autres agendas ? Et si c’était le gouverneur de province la véritable cible de cette démarche ? Tambour Matin vous amène au coeur d’un dossier à multiples facettes.
« Une démarche qui viole le règlement intérieur de l’assemblée »
À la lumière de l’article 29, puis 55 du règlement d’ordre intérieur de l’organe délibérant , « l’assemblée plénière peut être convoquée en session extraordinaire par son Président sur un ordre du jour déterminé, à la demande soit de son bureau, soit de la moitié de ses membres soit du Gouverneur de province ».
Cette disposition, explique un juriste, « est claire et sans ambiguïté. Tant que le Président de l’Assemblée est en fonction et n’a pas délégué son pouvoir pour raison d’indisponibilité, les députés ne peuvent pas saisir le vice-président pour convoquer une session extraordinaire. Leur démarche est dors et déjà vouée à l’échec ». D’ailleurs, ajoute ce spécialiste du droit parlementaire, « le fait pour ces députés d’entreprendre cette procédure en pleine vacances parlementaires, alors qu’ils sont censés être dans leurs bases respectives, est un autre obstacle légale et peut être interprété politiquement comme un règlement des comptes ».
Et sur le plan de la forme, cet analyste relève plusieurs incongruités qui laissent tout observateur averti sans voix. « La plus patente est le fait que la demande de convocation de la session extraordinaire est adressée, par ce groupe de députés, au vice-président de l’Assemblée qui lui-même est signataire de la fameuse déclaration de retrait de confiance. Un montre administratif, mieux une invention procédurale qui viole tous les codes du droit parlementaire », explique-t-il.
Le gouverneur Mathias Kabeya, la véritable cible?
Des informations recoupées par Le Tambour renseignent que le président de l’Assemblée provinciale est juste un obstacle sur le chemin des députés pétitionnaires. Dans les couloirs de l’organe délibérant, certains parlementaires accusent Athanase Kabongo, sans l’avouer publiquement, « de protéger le Gouverneur de province Mathias Kabeya ». Ce groupe de députés voudrait à tout prix obtenir la déchéance du Chef de l’exécutif qu’ils accusent « de ne pas coopérer ».
En effet, d’après nos sources, « les droits dont il est question au dernier point de la déclaration des députés, seraient en réalité des avantages financiers supplémentaires qu’ils réclameraient, en prévision de la campagne électorale à venir. » Nos entrées à l’assemblée provinciale précisent, « le gouverneur de province est victime de son refus de partager la manne financière provinciale avec ces parlementaires, alors qu’ils en ont besoin pour battre campagne et assurer leur réélection. C’est ainsi qu’ils font tout pour faire sauter le dernier verrou, c’est-à-dire le président de l’Assemblée, pour enfin l’atteindre ».
Même si ces graves révélations sont rejetées en bloc par certains députés, l’opinion s’interroge sur le bien fondé d’une telle démarche, à 5 mois des élections générales au pays. Sachant que l’instabilité institutionnelle est la principale cause du non décollage de plusieurs provinces depuis 2019, une grande partie de la population kasaienne est dans l’étonnement de constater qu’à l’assemblée provinciale du Kasaï-Oriental, en lieu et place d’un contrôle parlementaire rigoureux et sérieux et le vote régulier d’édits, « les coups bas et les règlements de comptes sont érigés en mode de fonctionnement ».
|La Rédaction